L’autoportrait
L'autoportrait est une représentation picturale de
soi-même : Le peintre ou le
dessinateur se représente lui-même. Connu depuis l’Antiquité, ce genre de
représentation s’est imposée peu à peu :
Tout d’abord, au 14eme
siècle l’autoportrait apparaît discrètement dans certaines peintures à la
façon d’une signature. Perdu parmi d’autres personnages ou caché dans une
scène, le peintre perd discrètement son anonymat et devient reconnaissable.
Van Eyck, Les époux Arnolfini, 1434
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C’est le cas dans le tableau du peintre flamand Van Eyck : « Les époux Arnolfini » ou le peintre
apparaît en bleu dans le miroir pendu au fond de la pièce, ainsi que dans le
tableau de Boticelli : « L’adoration des mages », où le
peintre s’est représenté à l’extrême droite du tableau, le regard dirigé vers
le spectateur, l’invitant à regarder son tableau.
Durer, 1500
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Au
15ème siècle, la découverte de nouvelle techniques comme celle du miroir de
verre, permet à l'autoportrait de s’imposer. Le sujet était pratique, car il ne
nécessitait pas la présence de modèle. Ce genre pictural s’impose à la Renaissance grâce au courant de pensée humaniste , qui modifie les
conceptions de l’Homme et ses rapports au monde. L’artiste acquiert un nouveau
statut social. Il se représente seul sur le tableau, qui devient le témoignage
de sa place dans la société. La
Renaissance s’intéresse à l’homme.
En plus de représenter son statut social, le peintre va peu à peu exposer une
partie de sa personnalité. Il va, par des attributs ou des déguisements, faire
passer des messages sur son image. C’est le cas dans l’autoportrait de Dürer datant de 1500 (à gauche), il
s'identifie au créateur à travers la figure du Christ. Il affirme ainsi la
noblesse de son travail et sa fonction « sainte » de créateur. Le
peintre allemand Dürer est l’un des
plus grands représentants de l’autoportrait.
Dans son autoportrait de 1497, Dürer ne se représente pas comme un
simple artiste de province mais comme un aristocrate digne et paisible, habillé
dans de beaux vêtements.
L’autoportrait va rapidement devenir un outil d’introspection pour
le peintre.
Ainsi, au 17ème siècle, la série d’autoportraits de Rembrandt
peinte entre ses 22 ans et les quinze jours précédents sa mort ressemblent à
une autoanalyse. Tous les détails narratifs du tableau sont supprimés (fond neutre)
au profit de l’expression du peintre, reflet de sa vie intérieure. Ces
portraits « de lui-même », comme on disait à l’époque car le terme
« autoportrait » n’existait pas, ressemble à un journal intime :
un peintre communiquant avec lui-même à travers sa peinture.
Rembrandt, 1629 1640 1669
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Dans la lignée des
autoportraits de Rembrandt, apparaissent ceux de Van Gogh qui, à la façon du style expressionniste de la fin du 19ème
siècle, explore son identité intérieure entre 1887 et 1889. A la même époque,
Gauguin peint son "Autoportrait au
Christ jaune", qui dévoile différents traits de sa personnalité. Près
de deux siècles plus tard, N. Rockwell fera lui aussi un triple autoportrait
"racontant" son identité.
L'autoportrait est en effet dès la fin du XIXème siècle l'occasion
pour le peintre de raconter son histoire où du moins une partie. Ils utilisent ,pour
certains, tout comme le faisaient les peintres du 14eme siècle, des symboles
pour se personnifier. Le but n'est plus de dépeindre leur statut social comme
le faisaient leurs prédécesseurs. Leur but est de dévoiler une partie intime de
leur vie ou de leur personnalité. Ces symboles représentent davantage l'état
émotionnel où le récit anecdotique de leur vie d'artiste plutôt que l'image
qu'il souhaite laisser derrière eux.
Ainsi les autoportraits de Félix Nussbaum durant la seconde guerre
mondiale ou ceux de Frida Kahlo pendant la période trouble de 1930 au Mexique,
sont des témoins de vie et de souffrances de ces artistes.
Peu à peu les autoportraits vont, pour certains, se détacher du
geste pictural en même temps que la peinture se détache de la figuration.
La série d'autoportraits de Picasso n'est pas seulement témoin du temps qui passe mais c'est le moyen pour l'artiste d'expérimenter différentes techniques picturales. Tout comme le peintre Parmesan se représenta à travers un miroir déformant au 16eme siècle, Picasso expérimente sur lui-même ses innovations picturales.
Dans le portrait de 1938, Picasso se représente à la fois de face
(les yeux) et de profil. L’idée exprimée ainsi est peut-être celle du
dédoublement, et de la double signification des autoportraits : à la fois
introspection du peintre et image donnée par le peintre de lui-même au
spectateur.
Dans celui de 1929, Picasso se représente en ombre de profil,
mangé par le visage monstrueux d’une femme ogresse. Il propose une vision
intouchable, presque inexistante de lui-même. Il a perdu ici son enveloppe
corporelle et semble n’être qu’une pensée, un souvenir.
Notons que à l'opposé, dans les années 60, les autoportraits
hyperréalistes tel celui de N. Rockwell remettront au 1er plan la figuration
chargée de sens.
A travers ses différents autoportraits et leur évolution, on
remarque que cette représentation picturale, même si elle est prétexte à toutes
sortes d’exercices stylistiques, reste à la fois le miroir du peintre tel
qu’il se voit et le miroir du peintre tel qu’il souhaite être vu.
L'ACCUMULATION DANS LES DIFFERENTES
OEUVRES ETUDIEES
«Accumulation » vient du latin accumulare : « mettre en scène » et cumulus : « amoncellement ». C'est un entassement, un empilement, une multiplication, sur une surface ou dans un espace défini
De façon générale :
L'Accumulation possède un impact visuel supérieur à l'objet présenté de façon individuelle : L’accumulation lui donne une nouvelle identité :
Un spectateur ne remarquera pas forcément un portrait dans une salle d'exposition, ou un masque à gaz posé sur une toile ou encore un manteau suspendu à un porte-manteau mais il s'arrêtera et réfléchira face à 10 portraits identiques posés côte à côte (Warhol), il s'interrogera face à une accumulation de masques à gaz (Arman) ou face à une accumulation de vêtements (Boltanski).
L'accumulation est faite dans différents buts :
· Accumulation pour dénoncer la société de consommation(Arman) et pour exposer en masse et faire écho à notre société de consommation (Warhol)
· Accumulation pour évoquer l'amoncèlement au fil du temps, pour évoquer le souvenir et donc la mort. (Boltanski)
L'accumulation se présente ici de différentes façons :
· Dans le portrait & l'autoportrait
- avec les portraits tirés en séries par Warhol.
- avec les Triple ou double autoportraits sur une même toile de Rockwell, Kahlo ou Gauguin.
- Avec des séries d'autoportraits comme ceux de Picasso ou Nussbaum et Kahlo
· Dans des installations & sculptures
- avec les installations de Boltanski
- avec les sculptures d'Arman