Andy Warhol (1928-1987)
appartient au courant
artistique du Pop Art américain. Jusqu'en 1960, il est graphiste dans
la publicité. Warhol a l'idée d'utiliser les images des publicités pour en
faire des œuvres d'art. La sérigraphie sera pour lui un moyen idéal pour le faire
sans avoir besoin de savoir dessiner. il peut par cette méthode produire rapidement
et en grande quantité. Il commence donc sa carrière d'artiste en agrandissant de vulgaires publicités en projetant une photo
sur la toile : bouteille de Coca Cola,
pochoirs à l'acrylique de boite de soupe Campbell.
Août 1962, Marylin Monroe meurt. A. Warhol a
l'idée de choisir une photographie de Marilyn qu'il recadre et décide pour la
1ere fois d'utiliser la sérigraphie pour la reproduire en série en déclinant
plusieurs variantes. Le visage de
l'actrice rendra Warhol célèbre. Conscient
du pouvoir de l'image dans la société, Warhol va dorénavant s'emparer des
plus célèbres. Il s'intéresse ainsi à Elizabeth Taylor, dont tout le monde
parle à l'époque. Peintre journalistique, portraitiste et autoportraitiste, Il
met en avant dans ce tableau la réussite du modèle américain.
A
partir de 1962, il travaille dans son atelier, la Factory. Ce nom d'usine"
convient tout à fait au travail de l'artiste. Ses œuvres sont faites
"à la chaîne" et forment des séries, qui s'inscrivent complètement dans la consommation de masse de la
société américaine.
TEN LIZES (1963)
genre : portrait
5m67 x 2m01. 10 portraits de l'actrice américaine Elizabeth
Taylor, surnommée "Lize".
La technique utilisée ici est la
sérigraphie : photographie reproduite sur une toile.
Rappel de la technique de la sérigraphie à connaître : par sérigraphie nécessite d'agrandir l'image
par des clichés successifs pour obtenir un grand film tramé qui servira à
impressionner (faire une impression sur) l'écran . L'écran de sérigraphie est
constitué d'un tissu synthétique (avant en soie), aux mailles plus ou moins
serrées, qui est tendu sur un cadre. Le tissu est enduit d'un produit photo
sensible. Le film tramé représentant la photographie agrandie est tendu sur cet
écran et le tout est exposé à une lumière très vive. L'écran est ensuite lavé à
l'eau et seule l'image négative du film apparaît : les parties noires de
l'image, non impressionnées, se
dissolvent et libère les mailles de l'écran tandis que les parties blanches
durcissent et obstruent les trous des
mailles de l'écran. Après séchage, l'écran est positionné à plat sur une toile
ou un papier. De l'encre est versée puis étalée sur l'écran. A l'aide d'une
raclette l'encre est ensuite pressée fermement, l'encre traverse ainsi les
mailles libres du tissu et donne donc une image positive sur le support final.
L'écran peut servir un grand nombre de fois.
Voir la vidéo montrant
la technique, durée : 1mn54 :
http://www.youtube.com/watch?v=8S1gnALm3fM
Présentation du tableau : toile horizontale en coton et lin, couverte d'un pigment blanc argenté
(sûrement à l'aide d'une bombe de peinture pour carrosserie de voiture). Warhol
a appliqué 10 fois son cadre de sérigraphie de la photo de Liz sur cette
surface. Il a joué avec les hasards de la technique : l'écran de sérigraphie et
la raclette qu'utilisent l'artiste provoquent des bavures, des superpositions décalées,
des excès de peinture ou au contraire des transparences
Dû à la dimension très allongée de cette toile, le spectateur
est obligé de se déplacer pour la regarder.
Ces 10 visages identiques à la photographie initiale de
l'actrice respectent bien, comme le portrait classique, la fidélité du physique
du sujet mais la technique et ses résultats sur la toile sont inédits. Pour la 1ère fois, le rôle du savoir technique
du peintre est supprimé. L'utilisation de la sérigraphie ne demande aucun
savoir-faire manuel et annihile (anéantit) le geste du peintre. Pochoirs, photographies, sérigraphies mettent
à distance le peintre et élimine son style et sa touche personnelle.
Le sujet peint devient
objet, par la technique de la sérigraphie : Du modèle à la photographie, de la photographie à la sérigraphie et enfin
de la sérigraphie à la toile, Warhol dépersonnalise le sujet. Ce procédé de reproduction efface les modelés
et les détails de l'expression de Lize. Il n'y a plus de carnation, pas de
grain de peau ni de couleur de teint, donc pas de vie, juste une empreinte sans
âme. Ces empreintes ont quelques imperfections, tout comme les objets moulés en
série.
Le sujet peint devient objet par sa multiplicité : Il perd son identité dans sa reproduction
en série. Ici, l'actrice n'est plus une personne spécifique mais une image
symbolique. Warhol sous entend ici, qu'à force d'être trop médiatisée,
l'actrice perd son identité propre.
Ces 10 reproductions de
Lize forment une série, symbole de la consommation de
masse et dénonciation de l'accumulation d'images et d'objets dans la société. Ici
l'actrice est traitée comme un objet de consommation, comme des boites de soupe
Campbell ou des bouteilles de Coca Cola. Le sujet dépersonnalisé et est devenu
objet, symbole de la réussite du modèle américain.
Paradoxalement le
portrait devient icône, aussi connue que la Joconde : en même temps qu'elle
perd son identité intrinsèque (propre à elle) elle gagne une identité universelle
et devient immortelle.
Le Pop Art
Le
Pop Art est né en 1955 en Angleterre et vers 1960 aux Etats-Unis. La culture de masse aux Etats-Unis était très développée et très présente
dans la vie des américains. Les artistes américains vont donc se servir du
pouvoir de l'image avec la publicité, les magazines, les bandes dessinées, et
la télévision. Pour cela, ils vont sortir des objets ordinaires de leur
fonction de bien de consommation pour en faire des œuvres d'art.
Issu du travail de Robert
Rauschenberg et Jasper Johns aux
Etats-Unis, ce mouvement casse les codes de la peinture de l’époque et s’intéresse à un sujet peu représenté en
peinture : la culture de masse.
Les artistes utilisent des publicités, des symboles populaires et des personnes
connues dans différentes œuvres pour la représenter avec des techniques
picturales qui ne nécessitent aucune qualité plastique chez le peintre et
aucune connaissance artistique chez le spectateur. C'est LE courant artistique qui démocratise la peinture et qui la rend
proche d'un très large public.
En France, le courant du Nouveau réalisme avec Arman, tire sa substance
de l'émergence du Pop Art.