Warhol, Ten Lizes, 1963, musée moderne de Paris
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genre : portrait
Présentation : Cette œuvre, datée de 1963, mesure 5m67 x 2m01. Elle présente 2 bandes
horizontales de 5 portraits de l'actrice
américaine Elizabeth Taylor, surnommée "Lize". Ils sont identiques, en noir sur fond gris blanc
métallisé.
La technique utilisée ici est la sérigraphie : La reproduction d'une photographie
par sérigraphie nécessite d'agrandir l'image par des clichés successifs pour
obtenir un grand film tramé qui servira à impressionner (faire une impression
sur) l'écran . Les contrastes de l'image peuvent être alors volontairement changés. L'écran de sérigraphie est constitué
d'un tissu synthétique (avant en soie), aux mailles plus ou moins serrées selon
l'effet désiré, qui est tendu sur un cadre. Le tissu est enduit d'un produit
photo sensible. Le film tramé, représentant la photographie agrandie, est tendu
sur cet écran et le tout est exposé à une lumière très vive. L'écran est
ensuite lavé à l'eau et seule l'image négative du film apparaît : les parties
noires de l'image, non impressionnées,
se dissolvent et libèrent les mailles de l'écran tandis que les parties
blanches durcissent et obstruent les
trous des mailles de l'écran. Après séchage, l'écran est positionné à plat sur
une toile ou un papier. De l'encre est versée puis étalée sur l'écran. A l'aide
d'une raclette l'encre est ensuite pressée fermement, elle traverse ainsi
les mailles libres du tissu et donne donc une image positive sur le support
final. L'écran peut servir un grand nombre de fois.
Pour Ten lizes, le peintre a fabriqué un cadre
d'environ 1m de côté, il a choisi comme support une longue toile horizontale en
coton et lin. Il la couverte d'un pigment blanc argenté (surement
à l'aide d'une bombe de peinture pour carrosserie de voiture). Puis, il a appliqué
10 fois son cadre de sérigraphie sur cette surface. Il a joué avec les hasards
de la technique : l'écran de sérigraphie et la raclette qu'utilisent l'artiste
provoquent des bavures, des superpositions décalées, des excès de peinture ou
au contraire des transparences. Le cadre de cette sérigraphie resservira ultérieurement
pour une série de portraits d'Elizabeth Taylor cette fois en couleurs.
Rauschenberg, Collage, 1970
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Warhol, Marilyn, 1960
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Il commence sa carrière de peindre
en agrandissant de vulgaires publicités
par projection d'une photo sur lune toile : bouteille
de Coca Cola, pochoirs à l'acrylique de boites de soupe Campbell.
Août 1962,
Marylin Monroe meurt. A. Warhol a l'idée de choisir une photographie de Marilyn
qu'il recadre et décide pour la 1ere fois d'utiliser la sérigraphie pour la
reproduire en série en déclinant plusieurs variantes. Le visage de l'actrice rendra Warhol célèbre. Conscient du pouvoir de l'image dans la
société, Warhol va dorénavant s'emparer des plus célèbres. Il s'intéresse ainsi
à Elizabeth Taylor, dont tout le monde parle à l'époque. Peintre
journalistique, portraitiste et autoportraitiste, Il met en avant dans ce
tableau la réussite du modèle américain. A partir de 1962, il travaille dans son
atelier, la Factory. Ce nom d'"usine"
convient tout à fait au travail de l'artiste. Ses œuvres sont faites "à la
chaîne" et forment des séries, qui s'inscrivent complètement dans la
consommation de masse de la société américaine. Dans ce tableau Ten Lizes, les imperfection des
portraits apparaissent comme celle des objets moulés en série. La quantité a pris le pas sur l'unicité. Dans
ses œuvres, tout est objet et Warhol
détruit le côté exceptionnel de l'image en la répliquant . Du modèle à la
photographie, de la photographie à la sérigraphie et enfin de la sérigraphie à
la toile, Warhol dépersonnalise à la fois le sujet et annihile (détruit) le geste du
peintre. En effet, pochoir, photographie, sérigraphie relève cette même
démarche, celle de mettre à distance le peintre, d'en éliminer son style et sa
touche personnelle.
Warhol, Liz, 1964
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Distanciation avec la sérigraphie : le regard est loin
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Warhol, Joconde, 1962
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Ces 10 reproductions de Lize forment une série, symbole de la
consommation de masse et dénonciation de l'accumulation d'images et d'objets
dans la société. Ici l'actrice est traitée comme un objet, à l'instar des
boites de soupe Campbell ou des bouteilles de Coca Cola. Elle perd son identité
dans sa multiplicité. L'actrice n'est plus une personne spécifique mais une
image symbolique. Warhol sous entend ici, qu'à force d'être trop médiatisée,
l'actrice perd son identité propre . Paradoxalement elle devient une icône
aussi connue que la Joconde : en même temps qu'elle perd son identité
intrinsèque elle gagne une identité universelle et devient immortelle.
LIENS
Emission Palette : Ten Lizes, en deux parties :
Pop Art : histoire d’un mouvement artistique toujours aussi tendance
L’histoire du mouvement artistique appelé Pop Art n’est pas banale. Ce nom vient de l'abréviation de « popular art » en anglais. Ce courant artistique, qui est toujours d’actualité et qui a touché le monde entier, a commencé en Angleterre.
La naissance du Pop Art anglais date de 1955 et est attribuée au groupe nommé « Independent group »constitué notamment par les peintres Eduardo Paolozzi, Richard Hamilton et le critique d’art Lawrence Alloway.
L’independent group casse les codes de la peinture de l’époque et s’intéresse à un sujet peu représenté en peinture : la culture de masse. Il remet en question les points de vue traditionnels des beaux-arts.
I was a Rich Man's Plaything (1947)
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Paolozzi et Hamilton font beaucoup parler d’eux à cause de leurs collages devenus très célèbres et considérés comme les premières œuvres représentatives de ce mouvement. Ils se fascinent tous deux pour la culture populaire et l’étroite relation qui s’est installée entre l’homme et l’industrie. A travers les photomontages de R. Hamilton qui traduisent l’imagerie des magazines américains, on retrouve, à travers humour et érotisme, l’époque des années 1950. C'est un collage de Paolozzi "I was a rich man's playing" qui inclut la 1ere utilisation du mot "pop", celui-ci apparaissant dans un nuage de fumée au bout d'un revolver.
Le Pop Art anglais est un mouvement proche de la société. En effet la peinture, trop souvent considérée comme un art de privilège réservé à l’élite auparavant, se démocratise grâce à ce courant artistique particulier.
L’utilisation de publicités, de symboles et de personnes connues dans différentes œuvres est l’une des caractéristiques principales qui définit ce mouvement. On assiste à l’explosion du Pop Art en Angleterre et aux Etats-Unis. Les gens se sentent directement concernés par cet art décalé qui caricature la société et qui réduit les hommes à de simples consommateurs.
Rauschenberg
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Le Pop Art américain se développe vers la fin des années 50 en parallèle au Pop Art anglais. Il est issu du travail de Robert Rauschenberg et Jasper Johns, il se caractérise par un intérêt pour les objets ordinaires, l’ironie et par la confiance en la puissance des images. La culture de masse aux Etats-Unis était très développée et très présente dans la vie des Américains. Les artistes américains vont donc mettre en évidence le pouvoir de l'image par la publicité, les magazines, les bandes dessinées, et la télévision. Pour cela, ils vont sortir des objets ordinaires de leur fonction de bien de consommation pour en faire des œuvres d'art.
Lichtenstein, Hot Dog, 1963
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Les plus connus de ces artistes américains sontAndy Warhol, Roy Lichtenstein et Jasper Johns.
Johns, Flag, 1954
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Le Pop Art est simple et accessible. Les procédés utilisés par les artistes sont faciles et sont souvent de nouveaux produits qui sortent tout juste de cette société de consommation : peinture acrylique ou sérigraphie permettent à n'importe qui de reproduire correctement une image.
Ce mouvement artistique, qui n'oblige pas l'artiste à connaître les bases de la peinture classique pour s'exprimer, utilise des symboles populaires, ce qui permet à n'importe quel spectateur de reconnaître le sujet et de se sentir proche du tableau. En faisant cela, l'artiste désacralise l'œuvre d'art qui auparavant était réservée à d'une part, un artiste talentueux techniquement, et d'autre part à un spectateur averti, une élite et qui ne s'intéressait qu'à des sujets dit « importants ».
Il aborde le pop art comme un pur et simple objet de consommation (1960, Campbell soup, les bouteilles de Coca Cola). Pour cela, il utilisait la technique de la sérigraphie. Il rendait «artistiques » des produits fabriqués en masse. Grâce à cette technique , il met souvent en scène un seul visuel (photo) qu'il agrandit et met en couleurs vives, dévoilant par sa démesure sa particularité . Il utilise les photos de célébrités telle Marilyn Monroe ou Elizabeth Taylor. Il les reproduit des dizaines de fois, voir des centaines, retirant ainsi à l'œuvre d'art son caractère unique et rare. La sérigraphie n'était pas considérée comme proprement artistique, mais industrielle. En minimisant son rôle dans la production de son travail et en déclarant que n'importe qui pouvait faire de l'art et qu'il voulait être « une machine », Warhol a déclenché une révolution dans l'art. Son travail est rapidement devenu à la fois populaire et controversé.
On lui a notamment reproché d'être devenu simplement un "artiste d'affaires". En 1979, plusieurs commentaires défavorables ont été dits sur son exposition de portraits de personnalités des années 1970, les qualifiant de superficiels, faciles et commerciaux, sans profondeur ou sans indication de l'importance du sujet.
Avec le recul, cependant, certains critiques en sont venus à voir Warhol et la superficialité de la commercialisation comme « le plus brillant miroir de notre temps »,soutenant que « Warhol s'était emparé de quelque chose d'irrésistible dans la culture américaine dans les années 1970 ».
Le Pop Art fut un mouvement très apprécié pour sa simplicité, son esthétisme et ses couleurs dynamiques. Ce fut un vrai phénomène de société.
En France, le courant du Nouveau réalisme tire sa substance de l'émergence du Pop Art. Des artistes comme Arman, Jean Tinguely et Gerard Deschamps font partis de ce courant artistique.
Aujourd’hui encore on observe que le Pop Art et ses influences sont très présents dans la décoration actuelle. On retrouve toutes sorte de tableaux ou objets colorisés à la manière d’Andy Warhol.
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